Acte 3, scène 3

Portrait au vitriol

L'annonce de l'arrivée d'Arsinoé déclenche chez Célimène un portrait féroce de sa rivale. Elle la dépeint comme une fausse prude qui cache sa solitude et ses échecs amoureux sous un voile de vertu. Célimène révèle qu'Arsinoé, malgré ses airs dévots, cherche désespérément un amant et convoite particulièrement Alceste. La pruderie d'Arsinoé ne serait qu'un masque pour dissimuler son amertume et sa jalousie envers les femmes courtisées. Ce portrait au vitriol, interrompu par l'arrivée de la personne concernée, révèle la cruauté de Célimène mais aussi sa lucidité sur les hypocrisies sociales. La scène prépare brillamment l'affrontement entre les deux femmes, l'une coquette assumée, l'autre faussement vertueuse.

Acaste

Acaste
Marquis, soupirant de Célimène

Basque

Basque
Valet de Célimène

Célimène

Célimène
Jeune veuve courtisée par Alceste, Oronte, Acaste et Clitandre

Version Moderne

Version Originale

Basque
Arsinoé monte vous voir, Madame.
Arsinoé, Madame, Monte ici, pour vous voir.
Célimène
Qu'est-ce qu'elle me veut ?
Que me veut cette Femme ?
Basque
Éliante lui parle en bas.
Éliante, là-bas, est à l'entretenir.
Célimène
Qu'est-ce qui lui prend de venir ?
De quoi s'avise-t-elle ? et qui la fait venir ?
Acaste
Tout le monde sait que c'est une fausse prude. Son zèle religieux...
Pour Prude consommée, en tous Lieux elle passe ; Et l'ardeur de son zèle...
Célimène
C'est une hypocrite ! Au fond, elle adore le monde et essaie d'attirer les hommes, mais personne ne veut d'elle. Elle est jalouse de voir les autres avoir des amoureux. Comme personne ne s'intéresse à elle, elle critique tout le monde. Elle joue les prudes pour cacher qu'elle est seule et prétend que si elle n'a pas de charme, c'est par vertu. Mais elle rêve d'avoir un amant, elle a même un faible pour Alceste. Elle est furieuse qu'il s'occupe de moi et pense que je le lui vole. Sa jalousie la ronge et elle me critique partout en cachette. Je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi stupide et insupportable...
Oui, oui, franche Grimace, Dans l'Âme, elle est du Monde, et ses soins tentent tout, Pour accrocher quelqu'un, sans en venir à bout. Elle ne saurait voir, qu'avec un oeil d'envie, Les Amants déclarés, dont une autre est suivie ; Et son triste Mérite, abandonné de tous, Contre le Siècle aveugle, est toujours en courroux. Elle tâche à couvrir d'un faux Voile de Prude, Ce que, chez elle, on voit d'affreuse Solitude ; Et pour sauver l'honneur de ses faibles Appas, Elle attache du Crime, au Pouvoir qu'ils n'ont pas. Cependant, un Amant plairait fort à la Dame, Et même, pour Alceste, elle a tendresse d'Âme ; Ce qu'il me rend de soins, outrage ses Attraits, Elle veut que ce soit un Vol que je lui fais ; Et son jaloux dépit, qu'avec peine, elle cache, En tous endroits, sous main, contre moi se détache. Enfin, je n'ai rien vu de si sot, à mon gré, Elle est impertinente au suprême Degré ; Et...
Molière
Écrit par Molière Suivre