Version Moderne
Version Originale
Que le ciel dans sa bonté vous donne la santé de l'âme et du corps, et bénisse vos jours autant que le désire le plus humble de ses serviteurs.
Que le Ciel à jamais, par sa toute bonté,
Et de l'âme, et du corps, vous donne la santé ;
Et bénisse vos jours autant que le désire
Le plus humble de ceux que son amour inspire.
Merci pour ce vœu pieux. Asseyons-nous pour être plus à l'aise.
Je suis fort obligée à ce souhait pieux :
Mais prenons une Chaise, afin d'être un peu mieux.
Comment allez-vous depuis votre maladie ?
Comment, de votre mal, vous sentez-vous remise ?
Très bien, la fièvre est vite partie.
Fort bien ; et cette fièvre a bientôt quitté prise.
Mes prières ne méritent pas d'avoir obtenu cette grâce divine, mais toutes mes prières étaient pour votre guérison.
Mes prières n'ont pas le mérite qu'il faut
Pour avoir attiré cette grâce d'En haut :
Mais je n'ai fait au Ciel nulle dévote instance
Qui n'ait eu pour objet votre convalescence.
Vous vous êtes trop inquiété pour moi.
Votre zèle pour moi s'est trop inquiété.
On ne peut pas trop chérir votre santé. J'aurais donné la mienne pour vous guérir.
On ne peut trop chérir votre chère santé ;
Et pour la rétablir, j'aurais donné la mienne.
C'est pousser loin la charité chrétienne. Je vous dois beaucoup pour tant de bonté.
C'est pousser bien avant la charité Chrétienne ;
Et je vous dois beaucoup, pour toutes ces bontés.
Je fais moins que ce que vous méritez.
Je fais bien moins pour vous, que vous ne méritez.
Je voulais vous parler en privé d'une affaire. Je suis contente que personne ne nous espionne.
J'ai voulu vous parler en secret, d'une affaire,
Et suis bien aise, ici qu'aucun ne nous éclaire.
J'en suis ravi aussi. C'est si doux d'être seul avec vous, madame. J'ai prié le ciel pour ce moment qu'il ne m'avait jamais accordé.
J'en suis ravi de même ; et sans doute il m'est doux,
Madame, de me voir, seul à seul, avec vous.
C'est une occasion qu'au Ciel j'ai demandée,
Sans que, jusqu'à cette heure, il me l'ait accordée.
Je veux que vous m'ouvriez votre cœur sans rien me cacher.
Pour moi, ce que je veux, c'est un mot d'entretien,
Où tout votre cœur s'ouvre, et ne me cache rien.
Je ne veux que vous montrer mon âme entière. Je vous jure que si j'ai critiqué vos visiteurs, ce n'est pas par haine mais par un zèle qui m'emporte, un pur élan...
Et je ne veux aussi, pour grâce singulière,
Que montrer à vos yeux mon âme toute entière ;
Et vous faire serment, que les bruits que j'ai faits,
Des visites qu'ici reçoivent vos attraits,
Ne sont pas, envers vous, l'effet d'aucune haine,
Mais plutôt d'un transport de zèle qui m'entraîne,
Et d'un pur mouvement...
Je le prends comme ça, vous vous souciez de mon salut.
Je le prends bien ainsi,
Et crois que mon salut vous donne ce souci.
Oui, madame, et ma ferveur est telle...
Oui, Madame, sans doute ; et ma ferveur est telle...
Aïe, vous me serrez trop.
Ouf, vous me serrez trop.
C'est par excès de zèle. Je ne veux pas vous faire mal, je préférerais...
C'est par excès de zèle.
De vous faire aucun mal, je n'eus jamais dessein,
Et j'aurais bien plutôt...
Que fait votre main là ?
Que fait là votre main ?
Je touche votre robe, le tissu est si doux.
Je tâte votre habit, l'étoffe en est moelleuse.
Arrêtez, je suis très chatouilleuse.
Ah ! de grâce, laissez, je suis fort chatouilleuse.
Mon Dieu, quelle belle dentelle ! Le travail d'aujourd'hui est miraculeux, on n'a jamais vu si bien fait.
Mon Dieu, que de ce Point l'ouvrage est merveilleux !
On travaille aujourd'hui, d'un air miraculeux ;
Jamais, en toute chose, on n'a vu si bien faire.
C'est vrai. Mais parlons de notre affaire. On dit que mon mari veut rompre sa promesse et vous donner sa fille. C'est vrai ?
Il est vrai. Mais parlons un peu de notre affaire.
On tient que mon Mari veut dégager sa foi,
Et vous donner sa Fille ; Est-il vrai, dites-moi ?
Il m'en a parlé, mais madame, ce n'est pas le bonheur que je désire. Mon bonheur est ailleurs.
Il m'en a dit deux mots : mais, Madame, à vrai dire,
Ce n'est pas le bonheur après quoi je soupire ;
Et je vois autre part les merveilleux attraits
De la félicité qui fait tous mes souhaits.
C'est que vous n'aimez rien sur terre.
C'est que vous n'aimez rien des choses de la Terre.
Mon cœur n'est pas de pierre.
Mon sein n'enferme pas un cœur qui soit de pierre.
Je crois que tous vos soupirs vont au ciel et que rien sur terre ne vous attire.
Pour moi, je crois qu'au Ciel tendent tous vos soupirs,
Et que rien, ici-bas, n'arrête vos désirs.
L'amour des beautés éternelles n'empêche pas l'amour des beautés terrestres. Nos sens sont charmés par les œuvres parfaites de Dieu. Sa beauté brille en vous mais vous êtes sa plus rare merveille. Il a mis sur votre visage des beautés qui surprennent les yeux et transportent les cœurs. Je n'ai pu vous voir, créature parfaite, sans admirer en vous le Créateur et sentir mon cœur brûler d'amour pour le plus beau portrait où Dieu s'est peint. D'abord j'ai cru que c'était une tentation du diable. J'ai voulu fuir vos yeux, pensant que vous étiez un obstacle à mon salut. Mais j'ai compris, ô beauté, que cette passion n'est pas coupable, qu'elle peut s'accorder avec la vertu. C'est une grande audace d'oser vous offrir mon cœur mais j'attends tout de votre bonté. Mon espoir, mon bonheur sont en vous. Vous décidez de ma joie ou de ma peine. Je serai heureux si vous voulez, malheureux si vous le décidez.
L'amour qui nous attache aux Beautés éternelles,
N'étouffe pas en nous l'amour des temporelles.
Nos sens facilement peuvent être charmés
Des ouvrages parfaits que le Ciel a formés.
Ses attraits réfléchis brillent dans vos pareilles :
Mais il étale en vous ses plus rares merveilles.
Il a sur votre face épanché des beautés,
Dont les yeux sont surpris, et les cœurs transportés ;
Et je n'ai pu vous voir, parfaite Créature,
Sans admirer en vous l'Auteur de la Nature,
Et d'une ardente amour sentir mon cœur atteint,
Au plus beau des Portraits où lui-même il s'est peint.
D'abord j'appréhendai que cette ardeur secrète
Ne fût du noir Esprit une surprise adroite ;
Et même à fuir vos yeux, mon cœur se résolut,
Vous croyant un obstacle à faire mon salut.
Mais enfin je connus, ô Beauté toute aimable,
Que cette passion peut n'être point coupable ;
Que je puis l'ajuster avecque la pudeur,
Et c'est ce qui m'y fait abandonner mon cœur.
Ce m'est, je le confesse, une audace bien grande,
Que d'oser, de ce cœur, vous adresser l'offrande ;
Mais j'attends, en mes vœux, tout de votre bonté,
Et rien des vains efforts de mon infirmité.
En vous est mon espoir, mon bien, ma quiétude :
De vous dépend ma peine, ou ma béatitude ;
Et je vais être enfin, par votre seul Arrêt,
Heureux, si vous voulez ; malheureux, s'il vous plaît.
Votre déclaration est galante mais vraiment surprenante. Vous auriez dû mieux vous protéger et réfléchir avant. Un dévot comme vous, si réputé...
La déclaration est tout à fait galante :
Mais elle est, à vrai dire, un peu bien surprenante.
Vous deviez, ce me semble, armer mieux votre sein,
Et raisonner un peu sur un pareil dessein.
Un Dévot comme vous, et que partout on nomme...
Je suis dévot mais je reste homme ! Face à vos attraits célestes, le cœur ne raisonne plus. Je sais que c'est étrange venant de moi, mais je ne suis pas un ange. Si vous condamnez mon aveu, c'est la faute de vos charmes. Dès que j'ai vu votre splendeur surhumaine, vous avez régné sur moi. La douceur de vos regards a vaincu ma résistance. Elle a triomphé des jeûnes, prières et larmes, tournant tous mes vœux vers vous. Mes yeux et soupirs vous l'ont dit mille fois, maintenant je le dis avec ma voix. Si vous avez pitié de votre esclave indigne, si vous daignez me consoler, j'aurai pour vous une dévotion unique. Votre honneur ne risque rien avec moi. Ces galants de cour dont les femmes raffolent sont bavards et vantards. Ils se vantent de leurs conquêtes et divulguent tout. Leur langue indiscrète déshonore celle qu'ils prétendent aimer. Mais les gens comme moi aiment discrètement, gardent le secret. Notre réputation garantit votre sécurité. Avec nous, c'est l'amour sans scandale, le plaisir sans peur.
Ah ! pour être Dévot, je n'en suis pas moins homme ;
Et lorsqu'on vient à voir vos célestes appas,
Un cœur se laisse prendre, et ne raisonne pas.
Je sais qu'un tel discours de moi paraît étrange ;
Mais, Madame, après tout, je ne suis pas un Ange ;
Et si vous condamnez l'aveu que je vous fais,
Vous devez vous en prendre à vos charmants attraits.
Dès que j'en vis briller la splendeur plus qu'humaine,
De mon intérieur vous fûtes souveraine.
De vos regards divins, l'ineffable douceur,
Força la résistance où s'obstinait mon cœur ;
Elle surmonta tout, jeûnes, prières, larmes,
Et tourna tous mes vœux du côté de vos charmes.
Mes yeux, et mes soupirs, vous l'ont dit mille fois ;
Et pour mieux m'expliquer, j'emploie ici la voix.
Que si vous contemplez, d'une âme un peu bénigne,
Les tribulations de votre Esclave indigne ;
S'il faut que vos bontés veuillent me consoler,
Et jusqu'à mon néant daignent se ravaler,
J'aurai toujours pour vous, ô suave merveille,
Une dévotion à nulle autre pareille.
Votre honneur, avec moi, ne court point de hasard ;
Et n'a nulle disgrâce à craindre de ma part.
Tous ces Galants de Cour, dont les Femmes sont folles,
Sont bruyants dans leurs faits, et vains dans leurs paroles.
De leurs progrès sans cesse on les voit se targuer ;
Ils n'ont point de faveurs, qu'ils n'aillent divulguer ;
Et leur langue indiscrète, en qui l'on se confie,
Déshonore l'Autel où leur cœur sacrifie :
Mais les Gens comme nous, brûlent d'un feu discret,
Avec qui pour toujours on est sûr du secret.
Le soin que nous prenons de notre renommée,
Répond de toute chose à la Personne aimée ;
Et c'est en nous qu'on trouve, acceptant notre cœur,
De l'amour sans scandale, et du plaisir sans peur.
J'écoute votre rhétorique qui s'exprime clairement. Vous ne craignez pas que je raconte à mon mari votre déclaration ? Ça pourrait détruire son amitié pour vous.
Je vous écoute dire, et votre Rhétorique,
En termes assez forts, à mon âme s'explique.
N'appréhendez-vous point, que je ne sois d'humeur
À dire à mon Mari cette galante ardeur ?
Et que le prompt avis d'un amour de la sorte,
Ne pût bien altérer l'amitié qu'il vous porte ?
Je sais que vous êtes trop bonne pour ne pas pardonner ma témérité. Vous excuserez la faiblesse humaine de cet amour violent. En vous regardant, comprenez qu'on n'est pas aveugle et qu'un homme est de chair.
Je sais que vous avez trop de bénignité,
Et que vous ferez grâce à ma témérité ;
Que vous m'excuserez sur l'humaine faiblesse
Des violents transports d'un amour qui vous blesse ;
Et considérerez, en regardant votre air,
Que l'on n'est pas aveugle, et qu'un Homme est de chair.
D'autres réagiraient différemment, mais je veux être discrète. Je ne dirai rien à mon mari, mais en échange je veux quelque chose. Soutenez franchement le mariage de Valère et Mariane. Renoncez à cette union injuste qui vole le bien d'un autre. Et...
D'autres prendraient cela d'autre façon, peut-être ;
Mais ma discrétion se veut faire paraître.
Je ne redirai point l'affaire à mon Époux ;
Mais je veux en revanche une chose de vous.
C'est de presser tout franc, et sans nulle chicane,
L'union de Valère avecque Mariane ;
De renoncer vous-même à l'injuste pouvoir
Qui veut du bien d'un autre enrichir votre espoir ;
Et...