Version Moderne
Version Originale
Parguenne! On s'est mis dans une sacrée galère tous les deux, et je ne sais pas comment on va s'en sortir.
Parguenne! j'avons pris là tous deux une gueble de commission; et je ne sai pas, moi, ce que je pensons attraper.
Que veux-tu, mon pauvre ami? On doit obéir à notre maître et on a tous les deux intérêt à ce que sa fille, notre maîtresse, soit en bonne santé. Si elle guérit, peut-être qu'on sera récompensé quand elle se mariera. Horace est généreux et il est ouvert à toutes les propositions, même si sa fille a montré de l'affection pour un certain Léandre. Mais son père n'a jamais voulu qu'il épouse sa fille.
Que veux-tu, mon pauvre nourricier? il faut bien obéir à notre maître; et puis nous avons intérêt l'un et l'autre à la santé de sa fille, notre maîtresse; et sans doute son mariage, différé par sa maladie, nous vaudroit quelque récompense. Horace, qui est libéral, a bonne part aux prétentions qu'on peut avoir sur sa personne, et, quoi-qu'elle ait fait voir de l'amitié pour un certain Léandre, tu sais bien que son père n'a jamais voulu consentir à le recevoir pour son gendre.
En pensant à voix basse. Comment pourrais-je me venger?
Ne puis-je point trouver quelque invention pour me venger?
Mais quelle idée lui est passée par la tête, puisque même les médecins ont tous perdu leur latin là-dessus?
Mais quelle fantaisie s'est-il boutée là dans la tête, puisque les médecins y avont tous pardu leur latin?
Parfois, à force de chercher, on finit par trouver. Et parfois, les solutions les plus simples sont les meilleures...
On trouve quelquefois, à force de chercher, ce qu'on ne trouve pas d'abord; et souvent, en de simples lieux...
Oui, je dois me venger, peu importe le prix à payer. Ces coups de bâton m'ont fait mal et je ne peux pas les oublier. (Elle parle en se retournant et en heurtant les deux hommes.) Oh, pardon Messieurs, je ne vous avais pas vus. J'étais perdue dans mes pensées.
Oui, il faut que je m'en venge à quelque prix que ce soit, ces coups de bâton me reviennent au coeur, je ne les saurois digérer, et... (Elle dit tout ceci en rivant, de sorte que, ne prenant pas garde à ces deux hommes, elle les heurte en se retournant, et leur dit, ) Ah! Messieurs! je vous demande pardon, je ne vous voyois pas, et cherchois dans ma tête quelque chose qui m'embarrasse.
Chacun a ses soucis dans ce monde, et nous cherchons aussi ce que nous aimerions trouver.
Chacun a ses soins dans le monde, et nous cherchons aussi ce que nous voudrions bien trouver.
Est-ce quelque chose où je pourrais vous aider ?
Seroit-ce quelque chose où je vous puisse aider?
Ça pourrait être possible; nous essayons de trouver un médecin compétent qui pourrait soulager la fille de notre maître, atteinte d'une maladie qui lui a subitement fait perdre l'usage de la langue. Plusieurs médecins ont déjà tout essayé sans succès; mais parfois on trouve des gens avec des secrets étonnants, des remèdes particuliers, qui réussissent là où les autres ont échoué, et c'est ce que nous cherchons.
Cela se pourroit faire; et nous tâchons de rencontrer quelque habile homme, quelque médecin particulier, qui pût donner quelque soulagement à la fille de notre maître, attaquée d'une maladie qui lui a ôté tout d'un coup l'usage de la langue. Plusieurs médecins ont déjà épuisé toute leur science après elle; mais on trouve parfois des gens avec des secrets admirables, de certains remèdes particuliers, qui font le plus souvent ce que les autres n'ont su faire, et c'est là ce que nous cherchons.
Ah! Que le Ciel m'inspire une idée géniale pour me venger de mon imbécile de mari! (Haut.) Vous ne pouviez pas mieux tomber. Je connais le plus incroyable médecin du monde, pour les maladies désespérées.
Ah! que le Ciel m'inspire une admirable invention pour me venger de mon pendart! (Haut.) Vous ne pouviez jamais vous mieux adresser pour rencontrer ce que vous cherchez, et nous avons ici un homme, le plus merveilleux homme du monde, pour les maladies désespérées.
Et où peut-on le trouver, s'il vous plaît?
Et, de grâce, où pouvons-nous le rencontrer?
Il est en ce moment dans les bois, en train de couper du bois.
Vous le trouverez maintenant vers ce petit lieu que voilà, qui s'amuse à couper du bois.
Un médecin qui coupe du bois?
Un médecin qui coupe du bois?
Vous voulez dire qu'il cueille des plantes médicinales?
Qui s'amuse à cueillir des simples, voulez-vous dire?
Non, c'est un personnage étrange et fantasque. Il s'habille de manière extravagante, parfois il feint d'être ignorant et cache sa connaissance médicale. Il évite de pratiquer la médecine autant que possible.
Non, c'est un homme extraordinaire, qui se plaît à cela, fantasque, bizarre, quinteux, et que vous ne prendriez jamais pour ce qu'il est. Il va vêtu d'une façon extravagante, affecte quelquefois de paroître ignorant, tient sa science renfermée, et ne fuit rien tant tous les jours que d'exercer les merveilleux talents qu'il a eus du Ciel pour la médecine.
C'est intéressant, les grands hommes ont souvent une touche de folie.
C'est une chose admirable, que tous les grands hommes ont toujours du caprice, quelque petit grain de folie mêlé à leur science.
Ce type est vraiment fou, plus que vous ne pouvez l'imaginer. Parfois, il va jusqu'à vouloir être battu pour prouver qu'il est capable. Je vous préviens, vous n'arriverez jamais à le convaincre qu'il est médecin, à moins que vous ne preniez chacun un bâton et ne le frappiez jusqu'à ce qu'il avoue. C'est comme ça que nous faisons quand nous avons besoin de lui.
La folie de celui-ci est plus grande qu'on ne peut croire, car elle va parfois jusqu'à vouloir être battu pour demeurer d'accord de sa capacité; et je vous donne avis que vous n'en viendrez point à bout, qu'il n'avouera jamais qu'il est médecin, s'il se le met en fantaisie, que vous ne preniez chacun un bâton, et ne le réduisiez, à force de coups, à vous confesser à la fin ce qu'il vous cachera d'abord. C'est ainsi que nous en usons quand nous avons besoin de lui.
Voilà une folie étrange!
Voilà une étrange folie!
Oui, mais après ça, vous verrez qu'il fait des miracles.
Il est vrai; mais, après cela, vous verrez qu'il fait des merveilles.
Comment s'appelle-t-il?
Comment s'appelle-t-il?
Il s'appelle Sganarelle, mais il est facile à reconnaître, c'est un homme avec une grande barbe noire et qui porte une collerette, avec un costume jaune et vert.
Il s'appelle Sganarelle; mais il est aisé à connoître, c'est un homme qui a une large barbe noire, et qui porte une fraise, avec un habit jaune et vert.
Un costume jaune et vert! C'est donc le médecin des perroquets?
Un habit jaune et vart! C'est donc le médecin des paroquets?
Mais est-il vraiment aussi compétent que vous le dites?
Mais est-il bien vrai qu'il soit si habile que vous le dites?
Comment ! C'est un homme qui fait des miracles. Il y a six mois, une femme avait été abandonnée par tous les autres médecins. On la considérait déjà comme morte depuis six heures et on s'apprêtait à l'enterrer, quand on a forcé cet homme à venir. Il lui a donné une petite goutte de je ne sais quoi dans la bouche et immédiatement, elle s'est levée de son lit et s'est mise à marcher dans sa chambre, comme si de rien n'était.
Comment! c'est un homme qui fait des miracles. Il y a six mois qu'une femme fut abandonnée de tous les autres médecins, on la tenoit morte il y avoit déjà six heures, et l'on se disposoit à l'ensevelir, lorsqu'on y fit venir de force l'homme dont nous parlons. Il lui mit, l'ayant vue, une petite goutte de je ne sais quoi dans la bouche, et dans le même instant elle se leva de son lit et se mit aussitôt à se promener dans sa chambre, comme si de rien n'eût été.
Il devait s'agir d'une potion magique à base d'or.
Il falloit que ce fût quelque goutte d'or potable.
C'est bien possible. Il y a moins de trois semaines, un jeune enfant de douze ans est tombé du haut du clocher et s'est brisé la tête, les bras et les jambes en tombant sur le sol. Dès que notre homme est arrivé, il l'a frotté avec une certaine pommade qu'il sait faire, et l'enfant s'est immédiatement levé et s'est mis à jouer à la marelle.
Cela pourroit bien être. Il n'y a pas trois semaines encore qu'un jeune enfant de douze ans tomba du haut du clocher en bas, et se brisa sur le pavé la tête, les bras et les jambes. On n'y eut pas plus tôt amené notre homme qu'il le frotta par tout le corps d'un certain onguent qu'il sait faire, et l'enfant aussitôt se leva sur ses pieds et courut jouer à la fossette.
Cet homme doit avoir la médecine universelle.
Il faut que cet homme-là ait la médecine universelle.
Qui en doute?
Qui en doute?
Bon sang! C'est exactement l'homme qu'il nous faut; allons vite le chercher.
Testigué! velà justement l'homme qu'il nous faut; allons vite le charcher.
Nous vous remercions pour cette découverte.
Nous vous remercions du plaisir que vous nous faites.
Mais souvenez-vous de l'avertissement que je vous ai donné.
Mais souvenez-vous bien au moins de l'avertissement que je vous ai donné.
Hé ! Laissez-nous faire ; s'il suffit de le battre, la victoire est assurée.
Hé! morguenne! laissez-nous faire; s'il ne tient qu'à battre, la vache est à nous.
Nous sommes vraiment chanceux d'avoir fait cette rencontre, et je retrouve espoir.
Nous sommes bien heureux d'avoir fait cette rencontre, et j'en conçois, pour moi, la meilleure espérance du monde.