Version Moderne
Version Originale
Qu'est-ce que tu veux, papa ? Ma belle-mère m'a dit que tu me cherches.
Qu’est-ce que vous voulez, mon papa ? Ma belle-maman m’a dit que vous me demandez.
Oui, approche. Regarde-moi bien. Alors ?
Oui, venez çà, avancez là. Tournez-vous, levez les yeux, regardez-moi. Eh !
Quoi, papa ?
Quoi, mon papa ?
Tu n'as rien à me dire ?
N’avez-vous rien à me dire ?
Si tu veux, je peux te raconter l'histoire de Peau d'âne, ou bien la fable du Corbeau et du Renard, que j'ai apprises récemment.
Je vous dirai, si vous voulez, pour vous désennuyer, le conte de Peau d’âne, ou bien la fable du Corbeau et du Renard, qu’on m’a apprise depuis peu.
Ce n'est pas de ça que je parle.
Ce n’est pas là ce que je demande.
Qu'est-ce que tu veux alors ?
Quoi donc ?
Ah, tu fais la maligne, tu sais très bien de quoi je parle.
Ah ! rusée, vous savez bien ce que je veux dire.
Excuse-moi, papa.
Pardonnez-moi, mon papa.
C'est comme ça que tu m'obéis ?
Est-ce là comme vous m’obéissez ?
Je t'ai pas dit de me dire tout ce que tu vois en premier ?
Ne vous ai-je pas recommandé de me venir dire d’abord tout ce que vous voyez ?
Alors, l'as-tu fait ?
L’avez-vous fait ?
Oui, papa. Je t'ai dit tout ce que j'ai vu.
Oui, mon papa. Je vous suis venue dire tout ce que j’ai vu.
Et tu n'as rien vu aujourd'hui ?
Et n’avez-vous rien vu aujourd’hui ?
Non, papa.
Non, mon papa.
Oui, papa, vraiment.
Non, mon papa.
Bon, je vais te montrer quelque chose alors.
Assurément ?
Oh çà ! tu vas voir ce que tu vas voir !
Oh çà ! je m’en vais vous faire voir quelque chose, moi.
(Il va prendre une poignée de verges.)
Oh, papa !
Ah ! mon papa.
Oh ! oh ! petite menteuse, tu ne me dis pas que tu as vu un homme dans la chambre de ta sœur ?
Ah ! ah ! petite masque, vous ne me dites pas que vous avez vu un homme dans la chambre de votre sœur ?
Ça va t'apprendre à mentir.
Voici qui vous apprendra à mentir.
Pardon, papa ! C'est juste que ma sœur m'a demandé de ne rien dire ; mais je vais tout te raconter.
(se jette à genoux.)
Ah ! mon papa, je vous demande pardon. C’est que ma sœur m’avoit dit de ne pas vous le dire; mais je m’en vais vous dire tout.
D'abord, tu mérites une fessée pour avoir menti. Ensuite, nous verrons le reste.
Il faut premièrement que vous ayez le fouet pour avoir menti. Puis après nous verrons au reste.
Pardon, papa !
Pardon, mon papa !
S'il te plaît, papa, ne me punis pas !
Mon pauvre papa, ne me donnez pas le fouet !
Tu vas être punie.
Vous l’aurez.
Je t'en supplie, papa, ne le fais pas.
Au nom de Dieu ! mon papa, que je ne l’aye pas.
Allez, allez.
(la prenant pour la fouetter.)
Allons, allons.
Aïe, papa, tu m'as fait mal. Attends, je suis morte.
Ah ! mon papa, vous m’avez blessée. Attendez; je suis morte.
(Elle contrefait la morte.)
Quoi ? Louison, Louison ! Oh non ! Ma fille ! Je suis un malheureux, ma fille est morte. Qu'ai-je fait ? Maudites soient ces verges ! Oh, ma fille, ma petite Louison.
Holà ! Qu’est-ce là ? Louison, Louison. Ah, mon Dieu ! Louison. Ah ! ma fille ! Ah ! malheureux, ma pauvre fille est morte. Qu’ai-je fait, misérable ? Ah ! chiennes de verges. La peste soit des verges ! Ah ! ma pauvre fille, ma pauvre petite Louison.
Arrête de pleurer, papa, je ne suis pas vraiment morte.
La, la, mon papa, ne pleurez point tant, je ne suis pas morte tout à fait.
Tu vois, la petite maligne ? Bon, je te pardonne cette fois, à condition que tu me dises toute la vérité.
Voyez-vous la petite rusée ? Oh çà, çà ! je vous pardonne pour cette fois-ci, pourvu que vous me disiez bien tout.
Oui, papa.
Ho ! oui, mon papa.
Fais attention, parce que j'ai un moyen de savoir si tu mens.
Prenez-y bien garde au moins, car voilà un petit doigt qui sait tout, qui me dira si vous mentez.
Papa, ne le répète pas à ma sœur, d'accord ?
Mais, mon papa, ne dites pas à ma sœur que je vous l’ai dit.
Voilà, papa, un homme est venu dans la chambre de ma sœur quand j'y étais.
C’est, mon papa, qu’il est venu un homme dans la chambre de ma sœur comme j’y étois.
Je lui ai demandé ce qu'il voulait, et il m'a dit qu'il était son professeur de chant.
Je lui ai demandé ce qu’il demandoit, et il m’a dit qu’il étoit son maître à chanter.
Ah, je vois. Et ensuite ?
Hon, hon. Voilà l’affaire. Hé bien ?
Puis ma sœur est arrivée.
Ma sœur est venue après.
Elle lui a dit de partir, qu'il la rendait désespérée.
Elle lui a dit; « Sortez, sortez, sortez, mon Dieu ! sortez; vous me mettez au désespoir. »
Et lui, il ne voulait pas sortir.
Et lui, il ne vouloit pas sortir.
Qu'est-ce qu'il lui disait ?
Qu’est-ce qu’il lui disoit ?
Il lui disait plein de choses.
Il lui disoit je ne sais combien de choses.
Et ensuite ?
Et quoi encore ?
Il lui disait ceci et cela, qu'il l'adorait et qu'elle était la plus belle du monde.
Il lui disoit tout ci, tout ça, qu’il l’aimoit bien, et qu’elle étoit la plus belle du monde.
Et puis après ?
Et puis après ?
Ensuite, il s'est agenouillé devant elle.
Et puis après, il se mettoit à genoux devant elle.
Et puis après ?
Et puis après ?
Ensuite, il lui a embrassé les mains.
Et puis après, il lui baisoit les mains.
Et puis après ?
Et puis après ?
Ensuite, ma belle-mère est arrivée et il s'est enfui.
Et puis après, ma belle-maman est venue à la porte, et il s’est enfui.
C'est tout ?
Il n’y a point autre chose ?
Oui, papa.
Non, mon papa.
Mon petit doigt me dit quelque chose.
Voilà mon petit doigt pourtant qui gronde quelque chose.
(Il met son doigt à son oreille.)
Attendez. Eh ! ah, ah ! oui ? Oh, oh ! voilà mon petit doigt qui me dit quelque chose que vous avez vu, et que vous ne m’avez pas dit.
Oh, papa, ton petit doigt ment.
Ah ! mon papa, votre petit doigt est un menteur.
Fais attention.
Prenez garde.
Non, papa, ne le crois pas, je t'assure qu'il ment.
Non, mon papa, ne le croyez pas, il ment, je vous assure.
Très bien, on verra. Va-t'en maintenant et reste attentive. Ah, les enfants d'aujourd'hui ! Tant de soucis ! Je n'ai même plus le temps de penser à ma maladie. Vraiment, c'en est trop.
Oh bien, bien ! nous verrons cela. Allez-vous-en, et prenez bien garde à tout; allez. Ah ! il n’y a plus d’enfants. Ah ! que d’affaires ! je n’ai pas seulement le loisir de songer à ma maladie. En vérité, je n’en puis plus.
(Il se remet dans sa chaise.)